Comédienne et directrice de la compagnie de Théâtre Anapnoi, cette jeune artiste audoise nous parle de son parcours, de ses créations, de son actualité et se prête au jeu de nos 11 questions.
Fannie Lineros commence le théâtre à Carcassonne sous l’enseignement de Thierry Almont. Après trois années de licence d’Art du Spectacle à l’Université Paul Valéry (Montpellier), elle intègre la classe libre des Cours Florent.
À sa sortie d’école, elle joue dans plusieurs créations et fait une rencontre décisive en 2016 : celle d’Anne Contensou / Cie Bouche Bée pour la création de LIV. Les univers artistiques concordant, la collaboration se poursuit depuis 2016, avec plusieurs créations. En 2018, elle fait la rencontre de Michèle Heydorff qui lui proposera un rôle dans l’un de ses projets. En 2021, Fannie Lineros devient« artiste complice » du Théâtre dans les Vignes ».
Créations
Directrice artistique de la Cie Anapnoi, elle met en scène Les coloriés, d’après le roman d’Alexandre Jardin dans le cadre du festival d’Avignon 2021. Elle lance la même année plusieurs laboratoires de recherche autour de Spectrum, la nouvelle création jeune public « grand format » de la compagnie (prévue pour 2023/2024) et depuis ce mois de janvier 2022, elle met marche le travail autour de In limbo, une création tout terrain qui verra le jour d’ici 2023.
- Spectrum : C’est un texte qui s’est écrit au plateau avec les interprètes durant l’année 2021. Nous avons utilité ce creux de travail pour chercher ensemble, avec trois interprètes, autour du thème de la différence et plus particulièrement du syndrome Asperger chez la femme et de la dysphorie de genre « male to female ». De ces temps de chantiers est sortie une pièce à destination d’un public jeune qui sera crée en 23/34. Spectrum est une création pluridisciplinaire qui mêlera à la parole, des moments chorégraphiques dansés et de la musique en live (guitare). La sortie de résidence au théâtre des Trois Ponts nous permettra de montrer le travail aux professionnels.
- In Limbo : C’est un projet à destination des adolescents pour lequel nous avons souhaité partir de ce qu’eux souhaiterait voir au théâtre plutôt que ce que nous, adultes, aimerions leur dire. Nous avons donc crée un questionnaire sous forme de google form que nous avons pu faire passer à divers publics adolescents entre 13 et 17 ans afin d’en savoir plus sur leurs préoccupations actuelles. À partir de cela, nous écririons une petite forme au cours de l’année qui a pour but de se jouer dans des lieux divers : salles polyvalentes, salles de classe, médiathèques, etc. La création est prévue pour 22/23.
Actualité de la Cie Anapnoi
- Du 21 au 26 février 2022 : Résidence au Théâtre des Trois Ponts (Castelnaudary) pour Spectrum
Sortie de résidence le 25 vendredi février 2022 à 15h - Du 20 au 25 juin 2022 : Résidence d’exploration au Théâtre dans les Vignes (Cornèze) pour In Limbo
Actualité de Fannie Lineros
- 1er trimestre 2022 : Tournée de Petite Pluie (Taverny, Pont Scorff, Festival la tête dans les nuages à Angoulême)
- 12 mai 2022 : Restitution d’un atelier mené avec une classe du lycée Jules FIl dans le cadre du dispositif Canopé.
- 23 au 28 mai 2022 : Création de la pièce Ailleurs, de Lucas Gonzalez à Sens (89).
Découvrez-en un peu plus sur cette artiste à travers ses réponses à notre questionnaire.
1. Trois mots pour vous décrire ?
Concentrée, optimiste, curieuse.
2. Trois mots qui définissent votre travail ?
Engagé, pluridisciplinaire, pointilleux.
3. Si vous étiez un tableau, un livre ou un film, qui seriez-vous ?
Pas simple comme question. Je pense que je serais The fighting Téméraire de William Turner. Il y a dans ses tableaux une grande lumière et c’est sur celle-ci que je tente de me focaliser dans mon travail comme dans ma vie : la lumière de la connaissance, de la transmission à l’autre ; mais aussi la lumière de l’espoir et du futur qui point à l’horizon. Celle qui nous fait nous lever le matin et rêver à un monde plus « juste ». Dans ce tableau en particulier, le soleil est à l’horizon et une nouvelle sorte de bateau (un bateau à vapeur) représente le progrès, l’avancée. Turner peint la fin d’une ère et le début d’une nouvelle. C’est comme un cycle, un éternel recommencement. Enfin, il y a pour moi la dimension de l’exploration, du navire qui porte en lui des hommes pour partir à l’aventure de notre Terre (et à l’heure actuelle de l’Univers). J’aime à me considérer comme une exploratrice, dans ma vie, comme dans le travail.
4. Un rituel avant d’entrer en scène ?
Oui bien sûr ! En général je fais des étirements et du réveil corporel en écoutant TearDrop de Massive Attack. Je met mes écouteurs et je fais bien attention à ma respiration. Après, je mets un truc un peu plus funky juste avant d’enter sur scène, par exemple du Queen. Ça me met en joie. Je baille énormément aussi, ça détend les mâchoires.
5. Comment vous vient l’inspiration ?
En regardant et en écoutant. J’observe toujours ce qu’il y’a autour de moi et j’adore écouter les discussions des gens dans la rue. J’entends quelque chose, et mon cerveau rebondi dessus. Alors je le note quelque part, et après quand je suis plus tranquille, j’imagine des situations, ou j’écris. J’ai besoin de calme et d’ordre pour penser.
6. Comment le spectacle est-il entré dans votre vie, et inversement ?
Le spectacle a toujours fait partie de ma vie. Ma mère donnait des cours de théâtre à L’Amicale Laïque de Fontiès d’Aude et c’est là-bas que j’ai commencé à l’âge de 4 ans. J’adorais ça. Je ne pouvais pas m’empêcher d’apprendre le texte de tout le monde. Dans ma famille, on a toujours fait des sketchs et des karaoké aux repas de famille. J’aimais aussi l’ambiance des spectacles de fin d’année avec tout le village qui venait partager un moment de convivialité. Alors je ne me suis jamais vraiment posé la question de ce que je voulais faire plus tard : je voulais continuer à jouer. J’avais un professeur qui disait : « on ne choisit pas le théâtre, c’est lui qui nous choisit ». J’ai l’impression que ça a été le cas pour moi.
7. L’artiste/la compagnie avec lequel/laquelle vous voudriez passer une journée ?
Ahaha, très bonne question. J’ai une liste de metteur.s.e en scène avec lesquel.l.es j’aimerais énormément travailler et je pense que le nom doit être sur cette liste. En tant que directrice artistique, je pense que j’aimerais passer une journée avec Bob Wilson, pour avoir un aperçu de comment il crée ses spectacles, comment il les pense, comment il dirige tout ce travail là. Bob Wilson est un artiste fascinant : il a appris a construire des décors, créer des lumières (personne ne fait des lumières pareilles), a toujours une bande son exceptionnelle et a une attention particulière au détail. Tout est très millimétré : c’est à la seconde près, au centimètre près. En tant qu’actrice par contre, je crois que je préférerais passer la journée avec le TG Stan. J’admire énormément leur travail et j’ai la sensation qu’il y a une direction d’acteur géniale : une sorte de liberté galvanisante.
8. Un spectacle que vous aimez particulièrement ?
J’ai adoré Einstein on the Beach de Robert Wilson. J’avais 19 ans et j’étais à l’Université à Montpellier et j’ai été absolument scotchée par le spectacle. Je suis ressortie pleine de joie, inspirée. C’est un vrai spectacle expérience. Je me suis laissée portée par les sons, par les corps, par les lumières et c’était complètement fou. Très puissant. Je ne sais pas comment je réagirais en le revoyant aujourd’hui, mais je le porte en moi comme l’un de mes meilleurs souvenirs de théâtre.
9. Sur scène, que représente pour vous le public, les spectateurs ?
Les spectateurs sont mes partenaires de jeu. Je peux les sentir, même si je ne les vois pas. Et selon leur humeur, le spectacle ne sera pas le même. La différence entre deux représentations selon le public qui est assis dans la salle est énorme. Un soir, ça va rire à gorge déployée, le lendemain il n’y en aura quasiment pas et à la place il y aura une écoute intense. Pour moi, il compte donc énormément. C’est pour eux que nous faisons des spectacles et c’est avec eux que nous les faisons.
10. L’endroit où vous rêvez de jouer ?
J’aurais répondu les Bouffes du Nord, car c’est un lieu que je trouve absolument magique en France, mais j’ai déjà pu réaliser ce rêve. Maintenant, je répondrais plutôt quelque chose comme Épidaure. J’ai eu la chance d’y aller et de pouvoir tester l’acoustique et celle-ci est absolument remarquable. Ce serait un plaisir de pouvoir me représenter dans un tel lieu, si marquant dans l’Histoire du théâtre. Un lieu qui a traversé les âges malgré les crises. Qui représente une continuité de l’art dans un monde qui ne cesse de changer et d’évoluer.
11. Le spectacle vivant, ça sert à quoi aujourd’hui ?
À la même chose que depuis la nuit des temps : à se reconnecter à quelque chose de plus grand, à faire prospérer les connaissances communes, à partager des moments ensemble, à imaginer des mondes futurs, à se projeter, à se raconter des Histoires.
Plus d’infos sur Fannie Lineros et la Cie Anapnoi :